Académie Mohammed VI : « l’usine à étoiles » la plus influente d’Afrique

Alors que les regards du continent africain et du monde se tournent vers le Royaume du Maroc, qui se prépare à accueillir la phase finale de la Coupe d'Afrique des Nations 2025, il semble que les discussions dans le milieu sportif marocain ne se limitent pas seulement aux tactiques ou à la quête du trophée absent depuis 1976 ; une histoire plus profonde domine la scène nationale, une histoire intitulée « investir dans l’humain », dont le héros est une institution qui a su transformer à jamais le visage du football marocain : l’Académie Mohammed VI de football.

Lorsque le supporter marocain regarde la liste des « Lions de l’Atlas » choisie par l’entraîneur Walid Regragui, il trouve cinq piliers principaux formant la colonne vertébrale de l’équipe nationale, tous passés par cette forteresse sportive, à savoir : Nayef Aguerd, Azzedine Ounahi, Youssef En-Nesyri, Oussama Targuine et Abdelhamid Ait Boudlal. Malgré leurs parcours professionnels différents, ils parlent un langage footballistique commun, appris derrière les murs de l’académie devenue « l’usine à étoiles » la plus influente du continent.

Le succès de cette génération n’est pas le fruit du hasard ni d’un talent inné sans encadrement, mais le résultat d’un projet stratégique à long terme, dont les premières pierres ont été posées il y a deux décennies. Tarik Khazri, responsable du recrutement des talents à l’académie, affirme que ce projet n’a pas été motivé par un besoin urgent des clubs, mais incarnait une vision royale initiée par le roi Mohammed VI, visant à moderniser le système footballistique et à construire une génération capable de rivaliser à l’échelle mondiale.

Nasser Larguet, premier directeur technique de l’académie, se souvient des débuts : « Je suis arrivé sur le projet avec une feuille blanche, la tâche était immense, il a fallu tout concevoir de zéro entre 2007 et 2010, des plans architecturaux aux programmes sportifs et éducatifs. »

Larguet et son équipe ont parcouru tout le royaume, observant plus de 15 000 enfants, pour finalement ne retenir que 37 enfants, une sélection « rigoureuse » mais ciblée. Rapidement, les fruits ont commencé à mûrir : dès la deuxième année, les élèves de l’académie intégraient les équipes nationales des jeunes, des juniors et l’équipe olympique. Aujourd’hui, tout le monde parle de la « marque » de l’Académie Mohammed VI.

Cette marque ne se limite pas à la précision technique ou à la capacité à jouer sous pression dans des espaces réduits, mais concerne la « personnalité ». Khazri explique que les diplômés de l’académie se distinguent par une grande humilité et une conscience profonde qu’ils représentent quelque chose de plus grand qu’eux-mêmes.

Cette identité se manifeste clairement chez Nayef Aguerd, défenseur incarnant la sérénité et la responsabilité, chez Azzedine Ounahi, le maestro qui donne au Maroc un rythme élégant rappelant les meneurs de jeu classiques, chez Youssef En-Nesyri, arrivé à l’académie jeune avec vitesse et talent brut, devenu un attaquant doté d’une intelligence tactique et de capacités physiques faisant de lui un homme des grands rendez-vous. S’y ajoutent Oussama Targuine, intelligent au milieu de terrain, et Ait Boudlal, représentant la continuité de cette ligne de production unique.

Tarik Khazri refuse de mesurer le succès de l’académie uniquement par la signature de contrats professionnels ou le passage aux championnats européens. Pour lui, le vrai critère est la « maturité et la continuité », précisant : « Le pari ne se gagne pas à la sélection ou à la signature, mais lorsque le niveau du joueur se stabilise à long terme avec son club et son équipe nationale. »

Les chiffres parlent d’eux-mêmes... Parmi 57 joueurs supervisés par Larguet, 47 sont devenus professionnels, 15 ont directement rejoint l’Europe, plusieurs ont participé à des Coupes du Monde, aux Jeux Olympiques et aux finales de la CAN. Le modèle marocain est passé d’une simple « expérience » à une « méthodologie respectée » étudiée aujourd’hui par d’autres fédérations africaines cherchant à reproduire ce succès, selon le site officiel de la Confédération Africaine de Football (CAF).

La caractéristique la plus exceptionnelle de l’académie est son strict accent sur l’éducation. Larguet affirme que la discipline scolaire, la structure quotidienne et le respect de la vie collective font partie intégrante de la formation du joueur : « La carrière footballistique se termine à trente ou trente-cinq ans, il faut donc anticiper ce qui vient après. » Cette base éducative a donné aux joueurs la capacité de supporter la pression nationale immense sans se briser, et d’affronter les revers avec maturité et sagesse.

Avec le lancement de la Coupe d’Afrique des Nations 2025 dimanche, l’Académie Mohammed VI est un témoin vivant que l’excellence africaine peut être créée et développée sur le sol du continent. Le talent marocain n’est plus obligé de partir tôt en Europe pour réaliser son rêve, l’académie a changé la donne en fournissant une infrastructure et une méthodologie comparables aux grandes institutions mondiales.

Pour Nayef Aguerd, jouer la CAN 2025 à domicile a une signification qui dépasse le football : « C’est un immense honneur, et tous mes remerciements au roi pour sa vision globale du football marocain et africain. Nous avons tout donné pour défendre cette académie et les valeurs de notre pays. »

En conclusion, l’histoire de l’édition 2025 n’est peut-être pas seulement une quête d’un titre continental manquant, mais un « chapitre de consécration » pour un projet commencé avec patience et persévérance il y a vingt ans, confirmant que le Maroc n’a pas seulement construit une équipe forte, mais a forgé un « catalogue » nouveau du succès sportif en Afrique, mêlant identité nationale et standards mondiaux.